QU’EST-CE QUE PARLER VEUT DIRE ?
JOURNÉE D’ÉTUDE AU MANS
Auditorium du Carré Plantagenet
2, rue Claude Blondeau, Le Mans
L’ARGUMENT ET LE PROGRAMME :
Qu’est-ce que parler veut dire ?
Cette interrogation et son équivoque est peut-être, au fond, celle qui court tout au long de l’enseignement de Jacques Lacan. Il évoque, dès les premiers mots de son Séminaire, cette prise du langage sur l’être humain, avec le maître zen qui « interrompt le silence par n’importe quoi, un sarcasme, un coup de pied »1. Dans la voie ouverte par Freud, Lacan interroge tout d’abord la parole du sujet « pour autant qu’elle ne consiste pas simplement pour lui à se dire, ni même s’affirmer, mais à se faire reconnaître »2. A faire reconnaître la part de son désir « dans l’interférence et les battements que font converger sur lui les cycles du langage » qui l’ont précédé et l’ont « engendré par l’os et par la chair »3. Le vouloir-dire du sujet des premiers séminaires est en effet, ainsi que le rappelle Jacques-Alain Miller4, « désir de reconnaissance auprès d’un Autre majuscule, puis vouloir-dire à l’Autre, ou à partir de l’ Autre […] La parole est », ici, « toujours prise dans une […] stratégie à l’Autre, toujours déchiffrable comme une stratégie du sens ».
Ce vouloir-dire, à partir du séminaire Encore et avec l’introduction du concept de lalangue, cède la place un vouloir-jouir « où c’est la pulsion et non la signification qui est conçue comme le principe, le moteur de l’être parlant ». On est donc parti du sens pour arriver à la jouissance, là où la parole ne s’adresse plus à l’Autre. Cette assertion bouscule toutes les certitudes communément admises sur l’illusion d’une communication adéquate, ou bien encore sur les bienfaits thérapeutiques d’une parole enfin libérée. Le sujet, puis le parlêtre, a à se déprendre de « cet effort pour trouver un accord » qui « constitue la communication propre au langage »5. « Les gens communiquent, utilisent les mêmes mots, mais qui parle vraiment la même langue ? »6 s’interroge le rocker Nick Cave. Mais ça n’est pas parce qu’on ne parle pas la même langue qu’il faut renoncer à dire, et Nick Cave l’a bien compris, lui qui est aussi poète. Car « c’était bien le verbe », écrit Lacan, « qui était au commencement, et nous vivons dans sa création, mais c’est notre esprit qui continue cette création en la renouvelant toujours. »7
Ne pas renoncer, ne pas accepter le ravalement de la parole quand le discours de la science, associé au discours du capitalisme, promeut l’exactitude du chiffre et de la statistique au détriment du langage et de la singularité : les évaluations chiffrées et les items pré rédigés confisquent la parole du sujet contemporain, réduit à poser des croix pour valider des énoncés qui ne sont pas les siens.
Deux psychanalystes de l’Ecole de la Cause freudienne – dont l’un vient d’être nommé Analyste de l’Ecole et comme tel appelé à témoigner de ce que parler a voulu dire dans sa propre cure –, des enseignants en philosophie, en communication et en orthophonie viendront nous exposer ce que, pour eux et dans leur champ étroitement lié la parole, le thème de cette journée leur a inspiré.
2 Lacan J., « Discours de Rome », Autres écrits, Paris, Seuil, 2001, p. 135.
3 Lacan J., « Fonction et champ et de la parole et du langage », Ecrits, Paris, Seuil, 1966, p. 279.
4 Miller J.A., « Le monologue de l’Apparole », Quarto n°34, 1996, pp. 7 18.
5 Lacan J., Le Séminaire, Livre I, Les écrits techniques de Freud, Paris, Seuil, 1975, p. 9.
6 Cave N., Propos recueillis par Hugo Cassavetti, Télérama n° 3292, février 2013.
7 Lacan J., « Fonction et champ et de la parole et du langage », Ecrits, Paris, Seuil, 1966, p. 271.
Le Programme :
Association de la Cause freudienne Val de Loire-Bretagne
LE MANS – SAMEDI 1er JUIN 2013 – JOURNEE D’ETUDE
QU’EST-CE QUE PARLER VEUT DIRE ?
Accueil – 9h15
9h30 – présentation de la journée.
Présidence : Bernard Porcheret, psychiatre, psychanalyste
Christine Van Geen, agrégation et doctorat de philosophie
« Trouver la voix : l’impossible fondation de la légitimité à parler »
Discutants : Cécile Bartoli, psychologue, Gilles Chatenay, psychanalyste
Marie-Joëlle Prévert, enseignante, Centre de Formation Universitaire d’orthophonie, Nantes
« Parler c’est, parler sans savoir… »
Discutants : Christiane Choplin, psychanalyste, Stève Merit, psychologue
Nicole Denoit, doctorat de communication, enseignante à l’Université de Tours
« ‘Le bruissement de la langue’ ou ‘le frisson magnétique du sens’ »
Discutants : Chantal Guibert, Sylvie Bruneau, psychanalystes
Pause déjeuner : 12h30 – 14h30
Après-midi
Gilles Chatenay,
Psychanalyste à Nantes, membre de l’Ecole de la Cause freudienne
«L’étrangéité de la langue »
Discutants : Elisabeth Marion, psychanalyste, Yohan Trichet, psychologue
Bernard Porcheret
Psychiatre psychanalyste à Nantes, membre de l’Ecole de la Cause freudienne
Analyste de l’Ecole en exercice
« Un effort d’équivoque, c’est ce que parler veut dire en analyse »
17h30 – clôture de la journée
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