Colloque de
l’Association de la Cause Freudienne
Val de Loire – Bretagne (ACF-VLB)
Angers, Samedi 23 juin 2012,10 h – 18h
Comité scientifique : Laetitia Belle, Jean-Louis Gault, Guilaine Guilaumé, Anne-Marie Le Mercier, Fouzia Liget, Laurence Metz, Pierre Stréliski
Thématiques :
– Le symptôme entre vérité et jouissance – Du symptôme au sinthome : les restes symptomatiques – Le clinamen de la jouissance – Le symptôme entre dialectique et fixation
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La politique du symptôme en psychanalyse : argument
par Remi Lestien
En psychanalyse, non seulement on a une politique du symptôme, mais c’est tout aussi bien le symptôme qui a une politique, une action qui contraint le sujet à s’y adapter.
Dans l’ensemble des sciences du vivant et des sciences conjecturales, le symptôme est la manifestation par laquelle se manifeste un dysfonctionnement. Le but avoué est alors de chercher à lui donner le statut de signe pour en obtenir du savoir clinique – savoir dépouillé de toute attenance au particulier de l’événement. « Le signe c’est le symptôme lui-même, mais dans sa vérité d’origine », affirmait Foucault[1]. Ainsi, pour ces sciences, le repérage des symptômes a pour unique visée l’établissement d’un diagnostic fondé sur des signes.
« Finalement », si la science a trouvé son efficace, c’est à la disparition de tous les symptômes que la politique s’attelle dans une visée hygiéniste totalisante. Dans le domaine de la subjectivité, la classification DSM a cette prétention.
Pour la psychanalyse, la politique du symptôme est tout au contraire tournée vers la particularité du rapport des humains au langage, au singulier de cet accrochage inouï de chaque corps avec les signifiants qui le constituent.
Chaque être parlant est confronté, du fait du langage dans lequel il baigne bien avant d’être né, à un réel – confrontation qui est sa destinée. Le corps du sujet est parasité par le langage qui en retour s’en trouve, lui aussi, contaminé. Le symptôme est la conséquence de cette rencontre toujours contingente, toujours inappropriée entre les signifiants et le réel du corps. Il n’y a dès lors pas lieu de chercher à faire la liste des symptômes pour s’occuper de les faire disparaître. Le psychanalyste, par son désir, accueille l’usage singulier que le sujet en fait, non pour le guérir mais pour lui restituer un statut autonome par rapport à l’Autre sur lequel il s’était construit.
Le symptôme est politique de s’installer et dans le corps et dans la subjectivité pour s’y constituer tout autant aux détriments qu’à l’accommodation de la conscience du moi. Dans un premier temps, Lacan considérera le symptôme comme une question, une question qui s’avoue au Moi dans la non réalisation symbolique du sujet – une question chiffrée dont le déchiffrage permettrait de s’en libérer. Cette révélation du sens du symptôme laisse inentamée la question de la satisfaction pulsionnelle qui sera reprise par Lacan d’abord par articulation entre circuit pulsionnel et circuit sémantique puis par production d’un discours, et enfin par nouage entre les trois champs du symbolique de l’imaginaire et du réel.
Au-delà de la dimension de vérité du symptôme, de ce qui peut se dire quand l’analysant s’adonne au bien dire, se démasque un autre versant qui, lui, ne peut que se lire. « Le symptôme est un Janus d’avoir deux faces l’une de vérité et l’autre de jouissance »[2]. Jacques-Alain Miller pouvait situer cette dimension du symptôme « entre » l’être et l’existence[3]. Il ajoute que « c’est à propos du symptôme que la question de penser la corrélation, la conjonction du vrai et du réel devient brûlante »[4].
C’est ce brûlant que la dernière partie de l’enseignement de Lacan éclaire. « Joyce le sinthome » est un abord qui représente une radicale nouveauté en s’ouvrant à un au-delà de ce qui pourrait n’apparaître que comme une dialectique et en donnant les clés qui permettent de rendre compte des errements actuels de la psychiatrie contemporaine.
J.-A. Miller reprend à Freud le terme de fixation et l’articule à celui d’addiction[5]. Si le symptôme est une réponse au trauma de la langue sur le corps, il advient une fixation à l’évènement de jouissance initial qui entraîne une addiction « racine du symptôme qui est fait de la réitération inextinguible du même Un. »
C’est alors renversant de constater que le symptôme éliminé avec force des classifications DSM fait retour incognito dans la catégorie « addiction ». Cette catégorie enfle au point d’envahir tous les domaines de la subjectivité. Le symptôme exclu revient par la grande porte de l’addiction généralisée. La politique du classement DSM ne ferait alors que constater que pour chacun il y a un trait particulier, un point d’ancrage irréductible – une réponse sinthomatique singulière.
Lacan, dès « Fonction et champ de la parole et du langage », en 1953, enjoignait au psychanalyste de rejoindre la subjectivité de son époque[6]. Vingt-trois ans plus tard il demande aux psychanalystes un effort de poésie pour être à la hauteur d’un devoir lire qui vise le choc initial, là où l’articulation signifiante échoue sur l’impossible à donner du sens. À l’analysant de prendre à son compte ce « devoir lire » son symptôme, pour en extraire les restes et leur restituer la dimension de la Lettre.
[1] Michel Foucault, Naissance de la clinique, PUF, 1978, Chapitre 5 : « Des signes et des cas ».
[2] Jacques Alain Miller, « Lire un symptôme », Mental n° 26, juin 2011, p. 55. Ce texte est l’exposé introductif au prochain Congrès de la NLS à Tel Aviv, en juin 2012.
[3] Ibid., p. 50.
[4] Ibid., p. 55.
[5] Ibid., p. 56 et 58.
[6] Jacques Lacan, « Fonction et champ de la parole et du langage en psychanalyse », Écrits, Seuil, 1966, p. 321.
La politique du symptôme en psychanalyse :
LE PROGRAMME
8H30 ACCUEIL
9H30 OUVERTURE – REMI LESTIEN – DÉLÉGUÉ RÉGIONAL
9H45 SYMPTÔME ENTRE TROMPERIE ET VÉRITÉ
PRÉSIDENTE – MONIQUE AMIRAULT
• DOMINIQUE CARPENTIER
AVOIR UN PÉNIS OU ÊTRE UN GARÇON, CE N’EST PAS LA MÊME CHOSE
• MARIE CHRISTINE SEGALEN
UN SYMPTÔME TROMPEUR
10H45 USAGES DU SYMPTÔME
PRÉSIDENTE – ARMELLE GUIVARCH
• MARTINE MARHADOUR
FAIRE AVEC…
• NATHALIE LEVEAU
DU SYMPTÔME AU CONSENTEMENT
• ISABELLE STRELISKI
UNE ILLUSION COMME MODE DE VIE
12H CONVERSATION AVEC RODOLPHE BURGER
AVEC JEANNE JOUCLA ET ARIANE OGER
13H PAUSE DÉJEUNER
15H CRÉATIONS SOUS TRANSFERT
PRESIDENT — JEAN-LOUIS GAULT
• GERARD SEYEUX
PRISE DE TÊTE
• ELISABETH BRUNET
CROIRE LA VIE SUR PAROLE
• ISABELLE RIALET
SYMPTÔME ET CRÉATION ARTISTIQUE
16H15 PRÉSIDENTE – SOPHIE MARRET
• CONFERENCE D’HELENE BONNEAU
DE LA JOUISSANCE DU SYMPTÔME AU RÉEL DU SINTHOME
17H45 CLÔTURE — PIERRE STRELISKI
RENSEIGNEMENTS – GUILAINE GUILAUMÉ – 06 83 35 96 90
http://www.associationcausefreudienne-vlb.com